« Maim me, tame me. Go ahead, but you'll never change me. »

L’enfer, c’est les autres. Mieux vaut fuir le regard et la compagnie de ces derniers. J’ai mes propres démons ; en affronter de nouveaux ne me fait guère envie. Aussi, je me tiens à l’écart du monde. Inscrit aux abonnés absents, je laisse mon téléphone sonner dans le vide tandis que des mégots de cigarettes s’amoncellent dans le cendrier qui gît sur ma table de nuit. Même quand mes parents frappent à la porte de mon appartement, celle-ci demeure obstinément close. Je leur ai déjà assez donné. J’ai fait les études de droit qu’ils ont toujours voulues pour moi, je me suis rapidement trouvé un emploi stable afin de participer aux dépenses du foyer. Maintenant, c’est terminé. Tout mon être n’appartient plus qu’à toi. A chaque gorge tranchée, à chaque robot détruit par mes mains, mes pensées vont seulement vers toi.

L’enfer, c’est les autres. Mais toi, Do Hee-ya, tu étais un ange tombé du ciel. Quand tu es née, j’ai cru que tu serais celle qui pourrait sauver mon âme. A ton arrivée sur Terre, toutes les craintes que je nourrissais se sont dissipées. Peu importait que, pour m’avoir épousé, ta mère ait été déshéritée ; peu importait qu’avec nos vingt ans, on ait été trop jeunes pour être parents. Plus de doute, ni la moindre culpabilité. Puisque tout cela a fait que tu as pu exister. Tu as vu le jour alors que, dehors, il neigeait. Ta petite main s’est refermée sur l’un de mes doigts, et je t’ai tout de suite aimée. Tout le temps de ta coute vie, je n’ai jamais rien regretté. Ce n’est que depuis que tu es partie que des remords m’étranglent la nuit. Ce soir-là pourquoi t’ai-je abandonnée à cette machine ? Ou étais-je pendant que ce tas de ferraille défaillant te laisser te noyer ?

L’enfer, c’est les autres. Alors moi, j’ai pactisé avec le diable. A défaut de pouvoir te ramener à la vie, je répands la mort et la souffrance autour de moi. Réduire en pièces l’androïde qui n’a pas su te surveiller ne m’a pas suffi. Je me suis mis à traquer ceux qui, comme lui, ont été conçus dans l’illégalité et qui, pour moi, représentent un danger. J’ai tué ceux qui les fabriquaient. Je suis devenu un meurtrier. Dans cette ivresse assassine de violence et de vengeance, je cherche à m’intoxiquer et à oublier la vérité. Mais celle-ci finit toujours par me rattraper : je n’ai pas su te protéger.