Comme tous les jours normaux de semaine, Shin était allé à l'université, en bon élève qui ne sèche jamais les cours.  Enfin, on ne peut pas dire que c'était un modèle à suivre en matière d'étude, parce qu'à ses yeux chaque cours n'était qu'une occasion de plus pour dessiner.  Si on regarde ses cahiers de notes, ceux-ci sont remplis de gribouillis et de sketchs.  Ici un nouveau personnage.  Là un personnage a changer de coupe de cheveux, celui-là est train de rêver à son petit ami, etc.  Les cours d'histoire de l'art et tout  n'était que d'un ennui profond pour lui et s'il avait choisi cette discipline d'études, c'était simplement parce que c'était facile, plus facile que d'aller étudier les sciences et les mathématiques.  Parlant de mathématiques, il n'avait jamais été vraiment doué dans le domaine, il avait toujours eu de meilleures notes dans les cours de langues ou bien alors de géo.  Même que dans ces matières, il avait même étudié un peu en autodidacte, parce qu'il savait très bien certaine chose qu'il était sûr de n'avoir jamais étudié à l'école.  Quoi qu'il ne se souvenait pas non plus quand et où il avait appris tout ça.  Ça ne le préoccupait pas plus que cela.  Ce jour-là encore, son cahier de note s'était couvert de traits de crayons, les seuls mots étant entourés d'une bulle de conversation, n'ayant la plupart du temps pas du tour rapport avec le contenu de la lecture.  Assis au fond du grand auditorium, il n'avait dérangé personne et personne n'avait réalisé qu'il n'écoutait que d'une oreille, une oreille très discrète, sauf peut-être son voisin de gauche qui semblait observer avec curiosité le progrès de ses croquis.  Shin ne lui portait même pas attention, probablement qu'il n'avait même pas remarqué son intérêt, jusqu'à ce qu'il tire le cahier vers lui tandis que l'androïde prenait une pause et avait les yeux fermés.  Pas de bol pour le voisin, parce que ça ne voulait pas dire qu'il était inconscient à tout ce qui se passait autour de lui.  Une main posée sur celle du fautif eu raison de lui enlever toute envie de recommencer à fouiner et Shin a passé le reste du cours à somnoler, question d'accumuler des réserves d'énergie – bien qu'il n'en avait pas besoin, son père ayant bien pris soin de recharger ses batteries à son insu la veille.

Un scénario assez similaire s'est reproduit dans la journée jusqu'à la dernière heure de cours, annonçant le début de la liberté.  Comme tous les lundi soirs, Shin avait des plans avant de rentrer à la maison.  La technologie avait beau permettre la création de robots tellement perfectionné qu'on aurait dit des humains, mais ça n'empêchait toujours pas les gens de tomber malade et de mourir un jour.  Alors c'est comme ça que depuis des années, Shin était un bénévole à l'hôpital de son quartier auprès des enfants.  Il allait les distraire et leur remonter le moral, le temps de leur hospitalisation.  En plus d'être la mascotte favorite des enfants qui raffolaient de ses jeux, il était aussi la petite coqueluche du personnel infirmier.  Il lui arrivait souvent aussi de monter à l'étage supérieur du département de pédiatrie pour aller en gériatrie voir les vieilles dames qui n'oubliaient jamais de lui offrir un ou deux biscuits. Le lundi soir était le moment favori de Shin dans toute sa semaine, en-dehors des moments passés avec les membres de son groupe de musique, parce qu'il n'y a rien pour unir comme la musique.
La distance entre l'hôpital et le campus scolaire était plutôt moindre, alors le jeune homme aimait beaucoup s'y rendre à pied par jour de beau temps. Lorsqu'il pleuvait, il passait toujours par le transport en commun parce qu'il n'aimait pas trop l'eau.  Il avait une drôle d'impression à ce sujet mais il ne s'en était jamais réellement préoccupé plus que cela. Ce n'était pas particulièrement important.

Puisque le soleil était au rendez-vous, il marchait lentement dans les rues, sans se presser, son casque d'écouteurs posé sur sa tête.  Ignorant les gens autour de lui, il agitait la tête au rythme de la musique tout en fredonnant les paroles, baragouinant les mots là où il ne les reconnaissait plus ou parce qu'il ne connaissait pas aussi bien cette chanson.  Shin avait une longue liste de lecture et en faire le tour était bien long.  Sans compter les chansons qu'il aimait tout simplement trop pour ne pas abuser du bouton rejouer, tout usé au point que le petit dessin imprimé dessus était déjà tout effacé, même si les écouteurs n'avaient à peine que quelques mois.
Il était à quelques coins de rue de sa destination lorsqu'il se fit interpeler par un passant qui semblait l'avoir reconnu.

Shin lança un regard perplexe à l'inconnu qu'il ne connaissait visiblement pas.  D'ailleurs, avec le volume poussé un peu trop fort de ses écouteurs il n'entendait rien, du moins en avait-il l'impression.  Plutôt étonné, il pressa le bouton d'arrêt et dégagea ses oreilles afin d'entendre un peu quelque chose. Parce qu'il fallait tout de même l'admettre, cette situation était bien curieuse.  Les sourcils arqués, il semblait demander au jeune homme en face de lui s'il y avait quelque chose.  Il ne ressemblait pas du tout à un de ces passants de rue, payer à distribuer des flyers pour les restaurants du coin.  D'ailleurs il n'avait pas de pile de papiers dans les mains.  Shin commençait à se demander s'il n'avait pas échappé quelque chose.  Autrement, comme expliqué qu'un parfait inconnu l'aborde comme ça?  Ou c'était peut-être quelqu'un qui recrutait pour une agence de casting, après tout Shin avait une belle dégaine et il se baladait avec sa guitare sur le dos.  On lui avait déjà fait l'offre – qu'il avait déclinée – cette idée n'était pas sortie de nulle part pour gonfler son égo, si c'était possible que Shin s'enorgueillisse, carrément.

« Hein? »

Si au début Shin ne comprenait absolument pas ce qu'il se passait, il finit par analyser rapidement la situation dès qu'il reprit ses esprits : il était en train de se faire kidnapper. Voilà ce qui était en train de se passer! Son père lui avait déjà bien dit d'être prudent, parce que le monde est truffé de mauvaises gens, même qu'il était presque paranoïaque en fait. Shin se souvenait vaguement qu'autrefois il avait le droit de sortir un peu plus librement, mais il comprenait son père, après tout il était presque mort dans cet accident de voiture. N'importe qui se ferait du soucis plus facilement après cela. Toutefois, Shin commençait à regretter un peu de ne pas avoir voulu prendre les cours d'auto-défense que son père insistait à lui offrir. Il avait bloqué l'idée avec beaucoup de force, parce que Shin détestait par-dessus tout la violence. Mais là, il s'agissait bien d'une situation d'urgence et il ne pouvait rien faire pour s'en tirer : mine de rien la poignée de ce garçon était bien solide et Shin était du genre pas très fort, il n'avait jamais vraiment aimé le sport. Il se rappelle qu'en cours de gym, il était toujours essoufflé au bout de cinq minutes. Depuis l'accident, il n'a pas réessayé de faire du sport, il détestait trop et on lui avait dire de faire gaffe à sa santé, parce que son corps était fragilisé depuis l'accident.
En entendant les propos de l'étranger, Shin croirait entendre son père. Pourtant il n'était pas si tard, puis il ne faisait que rentrer à la maison après les cours. Forcément il n'avait pas le choix d'être encore dehors à cette heure-là. Quel drôle d'énergumène. Oh, mais en fait il ne savait pas que Shin rentrait des cours. C'était franchement bizarre. Il agita la main pour se déprendre.

« Woah, mais t'es qui toi? T'es vraiment timbré, je fais que rentrer tranquillement chez moi, tu paniques pourquoi? »

Shin lui lança un regard complètement perplexe, montrant également à quel point il trouvait cet énergumène complètement décalé. C'est peut-être un type échappé d'un asile pour fou? Shin ne réalisait pas que c'était un robot. Il avait toujours eu du mal à faire la distinction contrairement aux autres qui semblaient s'en rendre compte assez vite. Il lissa les plis de ses vêtements, pour ne pas inquiéter son père en rentrant avec des vêtements froissés. Il n'excluait quand même pas la possibilité d'un enlèvement. Rien ne lui disait que le garçon devant lui puisse être fiable.

« Je rentre tous les jours à la même heure… Tu serais pas un assassin ou alors un revendeur d'enfants? Je te préviens tout de suite, je suis plus un gamin, j'ai déjà 21 ans. Puis si je disparais mon papa il va lancer la police dans la ville entière pour me retrouver! »

Shin sortit une sucette à la cerise qu'il enfourna dans sa bouche après l'avoir ouverte d'un petit coup sec, une main experte dans l'ouverture de sachet de sucette. Il ne goûtait pas grand-chose quand il mangeait ça, mais il se souvenait qu'il avait toujours aimer ce bonbon, alors il continuait à les mettre machinalement dans sa bouche. Et son père se faisait un plaisir de toujours s'assurer qu'il n'en manque jamais. C'était peut-être plus pour faire plaisir à son père et par habitude qu'il continuait.

« En même temps, t'as pas l'air si méchant que ça. Mais c'est difficile de nos jours de savoir si les gens sont méchants ou pas. C'est quoi ton nom? »